Le blog d'une névropathe (mais vous n'avez rien de mieux à faire, vous?)





























 
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Le sieur Jean-Luc-sur-son-blanc-destrier a fait la peau au dragon qui gardait mes Très-Saintes-Pattes-de-Mouche et terrorisait par la même occasion les braves gens vivant dans les vertes contrées de ce pays merveilleux, et cela depuis, pfiuuuu, au moins une année...












 
Fabienne Franseuil est une brelle de la technique, mais l'euthanasie n'est pas autorisee dans ce beau pays. Vous pouvez la joindre via le mail à fabienne.franseuil[at]free.fr. A bonne entendeur... Et puis vous pouvez aussi aller vous promener par :
< ? ParisBlog * >




























Sans Prétention
 
vendredi, septembre 30, 2005  
De retour (en chansons)
Bon, ça ne passera pas tout de suite mais quelques antidotes se sont montrés efficaces. Pour vous donner une idée, je suis en train d'écouter ceci (je me suis débrouillée pour que tu n'aie qu'un lien à cliquer, c'est bon, tu crois que tu pourras y arriver ?). Ca colle assez bien à l'esprit du moment, avec un peu plus de fatigue tout de même. Il serait temps que je lâche un peu Miossec. Il serait temps que je cesse de perdre du temps comme si je devais en avoir toujours.
C'est décousu, là ? C'est normal, je suis pas encore tout à fait remise.
J'écoute ça, la tête sur les mains, je me remets certaines idées en place. Et puis si après ça tu as le coeur fendu en deux, tu peux écouter ça, ça ira tout de suite mieux. D'ailleurs ça va pas si mal, si ?

Dans ma boîte est tombée une proposition qui disait en substance : "dis ça te dirait de t'occuper de la vente de mes spectacles ? Il doit y avoir assez d'argent pour rémunérer deux personnes." Sachant que ce sont des spectacles carrément super, je devrais pas avoir à trop pousser mon enthousiasme... Je ne peux pas vous dire le nom dudit groupe ou vous faire écouter ce qu'ils font, vous comprendrez pourquoi. Par contre, si vous avez aimé les aventures dans les méandres du collège Jacques Decour, je suis tombée sur un petit morceau qui me fait penser un peu à cette ambiance. Aldebert. Je crois que je vais me renseigner un peu plus sur le jeune homme.

1:00 AM

jeudi, septembre 29, 2005  
Pause
Un début de nuit recroquevillée au fond de mon lit. Il pleut dans ma tête. Ce matin je n'avais pas envie de me lever.
Pas de cataclysme. Juste un gros raz le bol, là tout de suite. Alors je vais faire autre chose, travailler beaucoup par exemple, et je reviens quand ça va mieux. Ca m'évitera de dire des choses désagréables. Et qui serviront à rien, surtout.
A bientôt.

11:03 AM

mardi, septembre 27, 2005  
Et toujours aucun sens
Ceci est un texte que j'ai écrit il y a quelques mois. Ca aurait pu être une chanson, mais j'ai la colère gênante. Et il arrive encore qu'on ne me voie pas alors que j'aimerais bien.
Ca ne sera donc pas une chanson. A moins que je ne m'y mette moi-même. Ca faisait un moment que je vous avais pas entraînés dans les coins sombres. J'avais peur que vous me preniez pour une fille mièvre...

C’est le métal qui protège
C’est le métal qui ruine
Dis moi y as-tu songé
ce qu’on laisse derrière soi
tout ce qu’on ne saura jamais
chercher finir par trouver
Raisons, motifs, outrages
Mais la sève toujours la sève
Qui te ronge qui t’affame
Toujours trop ou trop peu
Les mains vides et la rage
Un monde en diagonale
Et toujours aucun sens
Et toujours aucun sens

Sourd, muet, aveuglé
Et la tristesse sans fard
Horizons assombris
De la fadeur partout
Tout boire jusqu’à la lie
Oublier chaque fois
Le hasard n’a pas su
Fossoyeur du désordre
Toutes ses bonnes intentions
La chaleur et le bruit
En compagnes fraternelles
Et l’ivresse enfin
Et toujours aucun sens
Et toujours aucun sens

Enfermé en soi-même
Plus sûrement qu’ailleurs
Encore les poings qui saignent
Existences imprécises
Les visages qui s’effacent
Le parfum de la terre
Le diaphragme qui grille
D’être toujours témoin
De la même inconstance
La furie mensongère
Quel sens à tout cela
Y croyais tu dis moi
A la sève apaisée
Aux lendemains qui chantent
A vivre à en crever
Mais toujours aucun sens
Mais toujours aucun sens

Et maintenant c’est la nuit.

1:57 PM

lundi, septembre 26, 2005  
Conte rendu
L'histoire commence vendredi soir. J'ai redressé mon appart comme j'ai pu pour pouvoir le recevoir. La lune décroissante a surveillé les opérations. Des années qu'elle domine la cheminée. Des histoires astrales me viennent en tête, je repense à un démon dévoreur qui avale régulièrement le soleil et la lune dans ma petite mythologie. Je repense au 11 août 1999.
Et puis j'ai vu le jeune homme que je devais recevoir. Fidèle à son image. Sa stature imposante me rendait plus petite encore. Je regrettai très fort feu mes chaussures à plate-forme spéciales concert, dont les trapèzes me permettaient de gagner d'un coup quinze bons centimètres. Trouver autre chose. Du coup j'ai commencé par le perdre dans le quartier de gare de l'Est, par lui faire enlever ses chaussures, deux fois, pour ensuite le couvrir de cendres, et lui faire boire du lait dans la paume de sa main droite. Après ça allait mieux, un peu ;)
Discussion fournie jusque tard dans la nuit. Petit à petit les chronologies qui se mettent en place. Des portes qui s'entrouvrent, un peu.
Un japonais le samedi midi avec deux personnes très agréables, ça parle de plein de trucs bien et notamment, dans le désordre, de Japon, de bouquins et de godes à paillettes (enfin, d'un gode à paillettes, ce qui est amplement suffisant). On embraye sur un circuit exhaustif de visite des échoppes de jeux de rôle, de bd, manga et affiliés. Je comprends mieux pourquoi les rôlistes sont attirés par ce coin. Nos guides connaissent leur domaine, c'est du pur bonheur. Moi qui n'y connais rien j'écoute, et ce qui fait du bien c'est qu'ils se donnent le mal de repêcher la pauvre béotienne que je suis sur le sujet. Déjà ça c'est pas rien. Ce qui est beau aussi c'est l'enthousiasme qui se dégage de chacun des trois. Bon d'accord ça les fout sans doute régulièrement dedans financièrement mais c'est tellement bon de voir des gens vivants que je me demande si on pourrait pas demander à la Sécurité Sociale de couvrir un peu leurs frais de temps en temps.
Et puis ce circuit avait la vertu de ceux qui l'ont mené, c'était le circuit de gens qui avaient vraiment envie de faire plaisir à leur visiteur, et ça c'est peut-être ce qui m'a le plus touchée. Des personnes que je reverrai avec un vrai plaisir.
Soirée avec Thiom et un parfait inconnu, petits plats dans les grands avec foie gras et confit à la Thiom, une soirée qui file gentiment.
Sinon oui, il y a eu un dimanche, consacré en somme à la contre-productivité dans son immaculée splendeur, avant que je ne raccompagne mon invité jusqu'à la gare. J'ai poussé mon perfectionnisme dans la contre-productivité jusqu'à oublier chez moi le thé que j'avais promis à Forgon (je reparlerai de lui une autre fois). Pour la deuxième fois de la journée. Avec le feu dessous. J'entends d'ici les applaudissements à la Pérusse devant la performance.

11:53 PM

jeudi, septembre 22, 2005  
Fabienne Franseuil chez Paris Dernière ?
Rentrant chez moi, dans ce soleil rasant qui rend les gens beaux. Sur la place, un jeune homme m'interpelle.
-C'est quoi ça ?
Il désigne mon dos. J'ôte une oreillette, interromps mon dialogue muet avec Barbara. J'explique. Il sourit.
-Vous connaissez Paris Dernière ? Vous savez, l'émission de Ardisson ? Ils font des sujets sur des choses comme ça. Vous devriez les contacter, ça les intéresserait... Faut faire connaître ça, ça serait bien de diffuser... C'est courageux en tout cas de faire ça...
Je m'empourpre discrètement, regarde le microscopique détail qui a entraîné la discussion, remercie chaleureusement. "Courageux", quel drôle d'adjectif.

9:41 PM

 
Soma sêma ?
On m'a posé il y a quelque temps une question toute simple.
"Vous souvenez vous du moment où vous avez eu le plus mal physiquement ?"
Ce n'est pourtant pas compliqué, et depuis le temps que je fulmine contre le dénigrement du corps que nous impose notre culture... Pourtant impossible de répondre à cette question, et pas à une autre.
On ne se blesse pas qu'à vos champs de bataille...

9:27 PM

 
Pars
surtout ne te retourne pas
Fais ce que tu dois faire
sans moi
Quoi qu'il arrive
je serai toujours avec toi
alors pars
et surtout
ne te retourne pas.

Jacques Higelin.

Plusieurs mois qu'elle revient sans cesse, la petite chanson, régulièrement. Voir, savoir, quand les autres ricanent aveuglément sous l'effet de l'ignorance ou de la peur. Comme si je n'avais pas assez de la mienne à affronter. Parfois c'est... dur. Les dunes succèdent aux dunes, parfois un mirage, parfois une image lointaine, et le plus souvent le seul son de mes pas étouffés par le sable. Ce n'est pas tout à fait le moment de penser à ça. Je sais ce que je laisse derrière moi ; je sais ce que je cherche. Un revers de la main et je continue mon chemin.

12:55 AM

samedi, septembre 17, 2005  
J'aime. Mon patrimoine
Ca y est, j'ai compris, hier, le sens de ce thème des journées du patrimoine. Il suffisait de corriger la ponctuation.
J'ai compris quand j'ai vu que le collège-lycée Jacques Decour ouvrait ses portes. Peut-être était-ce déjà le cas les années précédentes, mais je ne m'en suis rendu compte que cette année. Ca devait bien faire une bonne douzaine d'années que je n'étais pas entrée.
Jacques Decour. 5ème 2. 1989-90, quelque chose comme ça. En Allemagne, le Mur venait de tomber. Dans ma tête, les murs se faisaient plus que jamais infranchissables. Emmurée vivante, voilà ce que j'étais.
Mon père venait de faire une rupture d'anévrisme. De l'autre côté de la frontière. 47 ans. Malformation vasculaire. Indétectable avant qu'il ne soit trop tard. Et héréditaire. Merci mon petit papa. Tu m'auras au moins offert Paris, en dernier cadeau. Et ça, c'était un vrai cadeau.
Pendant que tu étais dans le coma, j'entrais à Jacques Decour. J'allais y faire un exposé avec Sarah sur le Requiem de Mozart. J'y travaillais encore quand un matin très tôt, ma grande soeur est venue dans ma chambre me dire qu'"il va falloir que tu sois très forte". Ne décrochez jamais le téléphone avant huit heures du matin, vous apprendrez les mauvaises nouvelles bien assez tôt. Je n'étais pas là pour présenter l'exposé.
Jacques Decour. Cours d'anglais. Ah, les cours d'anglais. Les places imposées par la prof. Et puis ce déplacement tout aussi imposé par la même prof, parce que le gars Clément, un cador angélique et infernal à la fois, avait tendance à trop discuter avec son petit camarade et sans doute pas en anglais. J'étais à l'origine à côté d'une petite blonde toute timide, qui devait s'appeler Frédérique.
La petite blonde s'est retrouvée à côté d'un petit jeune homme qui s'appelait Grégory K. Tandis que de mon côté, je déménageais derrière avec le gars Clément. Devant moi, j'avais le dos de mon premier amour. Bien sûr le jour où j'ai dû m'installer à côté du cador, je ne savais pas que j'avais juste devant moi mon premier amour. On était en début d'année scolaire. C'est peu à peu que j'ai réalisé ce qu'il se passait. Un amour fort est comme une maladie, on peut en suivre la progression jusque dans son organisme. Une légère tension, un léger tremblement. Trois fois rien. Quelques dixièmes de degrés, juste ce qu'il faut pour que les joues s'empourprent, imperceptiblement (du moins c'était ce que j'espérais). Et on a beau essayer de prévoir le truc en se couvrant, en buvant du jus d'orange par intra-veineuses, rien à faire, ça vous prend à la gorge puis ça vous secoue et vous ne maîtrisez plus rien.
Mon niveau d'anglais doit sans doute énormément à cette situation. Plusieurs années après, une autre histoire entérinerait la chose : être capable de m'exprimer en anglais était devenu chez moi un acte d'amour.
J'ai eu l'occasion de contempler à loisir le dos du jeune Grégory. Une stature fine, il n'était pas du genre à frapper comme un malade en basket. Un garçon qui préférait rester à l'intérieur quand les autres faisaient un foot dehors. Et la chevelure de Grégory, de lourdes boucles sombres et brillantes. Si j'avais pu faire le lien entre cette chevelure et celle que les sculpteurs hellénistiques faisaient à leurs statues d'éphèbes, je serais aujourd'hui l'une des plus éminentes héllénistes de la scène française. J'étais fascinée.
Grégory faisait de la calligraphie. Il avait découvert la calligraphie en début d'année. Petit porte-plume, plume étroite et courte, encre de Chine. Il calligraphiait avant le cours, dans ces salles profondes et sombres aux fenêtres qui forcent à regarder haut pour apercevoir un bout de ciel (bonne habitude si vous voulez mon avis, de forcer les enfants à porter leur regard vers le haut ;)). Deux yeux d'un brun chaud cerclés de petites lunettes arrondies (ne vous demandez pas pourquoi je suis attachée à mes petites lunettes). Penché sur sa feuille, luttant contre l'encre rétive qui parfois, pour se venger, lui tachait les doigts. Son silence, sa silhouette penchée sur le papier me reviennent encore aujourd'hui.
Je regardais les porte-plumes fleurir sur les tables des plus brutaux des garçons de ma classe en souriant de ces tentatives de duplication. Je n'étais pas la seule que fascinait le garçon calligraphe. Moi-même je sacrifiais à la calligraphie, écrivant des choses que je n'aurais naturellement avoué sous aucune torture. J'avais fait l'acquisition d'un porte-plume de couleur bleue, sur lequel je montais des plumes rigides comme la justice, mais qui s'assouplissaient au fur et à mesure. Si bien que même la gauchère que je suis parvenait à des résultats presque satisfaisants.
Qu'écrivait-il, le calligraphe ? Ca je n'en ai jamais rien su. Que voulez-vous, je pouvais me disputer à grand renfort de noms d'oiseaux avec tous les garçons de la classe, il y en avait un, un seul que j'évitais soigneusement. C'était tellement systématique que je suppose que quelqu'un d'un peu attentif aurait pu se rendre compte de ce qu'il se tramait bien avant que je m'en rende compte moi-même. La règle s'était composée progressivement en moi comme une évidence élémentaire : on ne touche pas au garçon calligraphe. Trop secret, trop fascinant. Ce garçon n'était pas pour moi. D'ailleurs ce n'était pas un garçon, c'était K., c'était pas pareil...
Je ne pouvais pas supporter l'idée qu'il apprenne... Et même quand quelques années, j'avais envisagé de lui dire, je préparais une petite valise et je projetais de repartir pour l'Allemagne. Il était impossible qu'il sache et que nous vivions dans le même pays. Une telle situation m'aurait semblé d'une prétention délirante, et pour tout dire sacrilège.
Je n'osais pas l'appeler par son prénom. Pour moi il était K. Un nom à consonnance juive, qui posait assez de distance pour que je puisse m'en servir. Je ne sais pas pourquoi j'avais évoqué son nom devant ma mère, mais elle m'avait parlé de mères juives, de leur traditionnelle possessivité (ah le grand savoir maternel...), touça touça... Une barrière qui venait s'ajouter à mes propres murs. Ah ça pour sûr, mon secret était bien gardé : je n'avais aucune chance. Avec un garçon je n'avais aucune chance (de toutes façons les garçons ne m'intéressaient pas) alors avec K...
Alors je déambulais dans la cour, je l'observais de loin, à la dérobée.



Je le regardais, toujours du coin de l'oeil, sourire d'un fin sourire, l'oeil plus brillant que jamais, pendant que des caïds de la classe bloquaient toutes les serrures des portes des salles de cours de la cour du collège, juste histoire d'échapper à une dizaine de minutes de maths pour le prix modique d'un demi-sachet de pipas (à peine trois francs à l'époque si je me souviens bien). Les portes grises refusaient de recracher les écorces de graines de tournesol savamment insérées, et la prof avait envie de se pendre. Elle pouvait se rassurer, ce n'était pas elle, mais son collègue d'histoire qui allait, quelques années plus tard... ce vieux fou de Fontaine ne vivrait pas si vieux. Il m'avait appris la loi de l'Habeas Corpus, il m'avait appris aussi que j'étais capable de faire des choses qui me ressemblent, et que ces choses pouvaient avoir de la valeur. Sa salle de classe était au deuxième étage, je n'ai pas trouvé le grand escalier carré en bois qui sentait le chaud et menaçait ruine. A la place, des installations complètement rénovées, lino au sol et grilles de métal. Autres temps...
Là où se trouvait le fief de "ce vieux fou de Fontaine", l'estrade où il gesticulait avec enthousiasme, le ventre rebondi et la barbe grisonnante sous son visage de père-Noël sous acide, il y avait une salle de techno habitée par un petit bonhomme qui s'occupait de petites voitures télécommandées (oups, des robots, devrais-je dire ;)) et qui offrait aux visiteurs une petite démonstration. J'étais la seule visiteuse. Dans un discours qu'il avait manifestement préparé, il a commencé à m'expliquer les activités qu'il faisait avec les enfants. Voyant mon sourire fendu jusqu'aux oreilles, il a marqué une pause au cours de laquelle il m'a demandé si j'avais un enfant scolarisé ici. Voilà bien longtemps qu'on m'appelle madame, mais j'avoue que celle-ci, on ne me l'avait encore jamais faite ;) J'explique ce que je fabrique ici, sans cesser de sourire.

Son téléphone sonne et je peux me replonger dans les méandres de mes souvenirs. La classe de Fontaine. Je l'avais revu quelques années après mon départ, je lui avais dit combien ses cours avaient pu compter pour moi. A cette époque les lieux n'avaient pas encore changé. Fontaine de son côté avait déjà fait une dépression, s'en relevait comme il pouvait. Il était plus calme qu'au temps où je prenais place sur les chaises de sa classe. Il faut se méfier des gens qui sourient, qui manifestent leur énergie vitale avec trop d'ostentation. Ils sont fragiles. Si jamais ils cessent de briller de l'intérieur durant une période prolongée, ils réalisent qu'ils sont dans le noir et prennent tellement peur que la réalité leur devient insupportable.
La classe de ce vieux fou de Fontaine était pleine de lumière, il y avait de petites fenêtres qui donnaient sur les toits de l'immeuble d'en face. Le sol était de parquet, quand il faisait chaud la pièce fleurait le bois chaud et la craie, quand nous revenions du sport et qu'il avait plu à seaux, elle sentait le bois mouillé et tous les parfums des bonbecs qu'on achetait en face de l'école dans une petite échoppe qui vendait des araîgnées et des rats en gélatine, énormes aussi grands que nos mains ouvertes à plat et tout colorés, et puis des pipas, en prenant bien soin de garder les écorces pour les cours de math du matin.

Le dernier cours de Fontaine. Ca je ne l'ai jamais oublié. Le contenu du cours m'échappe un peu, comme il m'avait passablement échappé alors. J'avais la tête ailleurs. J'étais en train d'envisager de faire une chose absolument délirante, et j'essayais de rassembler tout ce que je pouvais avoir de courage pour le faire. Quelques jours plus tôt j'avais fait l'acquisition à la papeterie au bout de la rue d'un porte-plume de couleur verte. Non, je n'avais pas perdu le bleu. Non, la couleur me convenait toujours et le mécanisme fonctionnait encore à merveille.
La fin du cours s'approchait dangereusement, et la cloche a sonné sans que j'aie suffisamment de courage pour mettre en oeuvre mon plan. Tout le monde ramassait ses affaires en faisant un boucan incroyable, le dernier jour de classe de l'année, la dernière heure de cours avant les vacances. Dehors il faisait beau, j'étais toujours assise, à peine mobile dans une vaine tentative de ramasser mes affaires pour les fourrer dans mon sac.
Je n'avais pas déblayé la moitié de mon fourbi que Grégory passait le seuil de la porte et s'engageait dans le couloir. Je me sentais misérable, mais j'avais une idée de ce que ça serait si je ne faisais pas quelque chose.
Je me suis levée et j'ai filé à toute vitesse, le poing serré sur mon porte-plume bleu. Grégory K. avait eu du mal à se frayer un chemin dans le couloir, tout le monde chahutait. Je ne sais pas si je l'avais appelé ou si je lui avait tapé sur l'épaule, je suppose que je l'avais appelé parce qu'il ne faut tout de même pas exagérer. De manière assez inattendue, il s'est retourné. Affolement général. J'avais la tête pleine de mots qui, bien alignés quand je préparais mentalement ce moment, s'étaient complètement mélangés. La course sans doute. J'ai fini par balbutier, rouge comme une pivoine, que je venais d'acheter un nouveau porte-plume et que du coup je n'avais plus besoin de l'ancien qui fonctionne encore très bien hein, "et comme tu fais de la calligraphie... tu le veux ?". Il m'a dit que c'était très sympa, m'a remerciée, puis il a repris son cheminement vers la sortie. Naturel, désarmant.
Bras ballants, vidée, je suis restée un peu dans le couloir. Je tenais à peine sur mes jambes, les larmes me montaient aux yeux, c'était ridicule mais quand même, j'avais beau cligner comme une folle pour éviter qu'elles ne tombent ça n'avait pas l'air de vouloir s'arrêter. Je regardais par la fenêtre, ici :

et je l'ai vu marcher gentiment, traversant la cour en diagonale. A cette époque il n'y avait pas ces préfabriqués. En tremblant, je suis retournée dans la salle de cours, j'ai fini de déblayer mes affaires en quatrième vitesse puis je suis descendue tout aussi vite.

Je descendais en essayant de retenir les détails de ces lieux, je longeai le cloître et bientôt j'étais dehors. Dehors, sa silhouette avait disparu.

Je changeais de collège l'année suivante, je quittais Jacques Decour, dans le 9e, pour un collège du 13e, à dix minutes de là où nous vivions... Je n'avais pour ainsi dire pas le droit de sortir. Paris étant à l'époque pour ma mère "cette catin de Babylone", raison de plus. Raison de plus effectivement pour que de mon côté j'essaie tous les chemins histoire de voir un peu de pays avant de rentrer. Comme par hasard, mon trajet favori, c'était la ligne de bus du 67 que je prenais place Pigalle.

L'un des seuls cas où j'aie désobéi à ma mère, c'était quand l'année suivante, en fin d'après midi, au lieu d'aller en permanence parce que le prof de musique était malade, je me projetais dans le métro comme un boulet de canon pour être à la sortie de Jacques Decour avant la fin des cours. Absolue nécessité. Même si je n'ai jamais plus osé lui adresser la parole.

Voilà. Mon patrimoine, c'est ça. Les photos sont un peu claires, donnent une vision paisible, plutôt à l'image de mon état d'esprit d'hier. Le temps passe. Et c'est bien.

8:55 PM

vendredi, septembre 16, 2005  
Quand je mange des raviolis, je me sens moins seule
... parce que j'ai l'impression d'avoir un animal de compagnie.
Auquel je suis en train de servir sa pâtée ;)

9:36 PM

 
Epuisant
...d'être appréciée de quelqu'un qui vous méprise trois lignes de dialogue plus loin. On va y aller doucement, ce soir. Pourquoi faut-il que ça tourne au vinaigre ? Pourquoi si rapidement ? Pourquoi faut-il que je le prenne si mal ? Pourquoi faut-il que je me sente si coupable, d'office ?
Je sais ce n'est pas très profond, très littéraire, ni très productif, j'avais juste besoin de poser ça quelque part.

9:02 PM

mercredi, septembre 14, 2005  
Send me dead flowers to my wedding
Mon cerveau est un petit rigolo. Cette nuit j'ai rêvé que je me mariais. Oui, je sais, je suis encore mariée, mais ce n'est pas la première chose qui me surprend dans ce rêve...
Pour en rajouter un peu à l'incongruité de la situation, c'était un mariage traditionnel. Je ne pensais pas que le musée des ATP de Strasbourg m'avait marqué à ce point, ma visite date d'il y a deux ans.
Ce mariage était précédé de deux cortèges. Le premier, allant de la maison de la fiancée à celle du fiancé, avait déjà eu lieu. Le second se rendait en sens inverse jusqu'à la maison de la fiancée où les festivités devaient se dérouler. C'est à l'occasion de ce cortège que commence mon rêve.
Je suis la file des gens qui marchent dans les hautes herbes à travers les champs. Manifestement, mes parents vivent dans une maison très reculée. Le cortège se compose de personnes vêtues de vêtements traditionnels, la coiffe arrondie, l'étoffe sombre des hommes, le visage fermé et grave de tous. Quelques jeunes gens s'agitent un peu pour tenter de donner une allure de fête à la chose. Mais c'est surtout le silence qui rêgne au-dessus des têtes penchées dans la marche. Je remarque une chose étrange : je suis habillée pour ma part de manière bien étrange, longue robe ocre, chapeau à motif de pelage de vache, bottes rose-violacé, improbables. Je me demande ce que je suis en train de penser de ce qui se passe, et pourquoi je me suis habillée de cette manière. Les autres à côté ne prêtent pas attention à moi, ils me verront bien assez tôt dans cette tenue que je n'aurais pas le mauvais goût (supplémentaire) d'enlever, par orgueil sans doute. Parmi ces gens se trouve mon futur époux. Je fais de mon mieux pour ne pas voir son visage mais les personnes à côté de moi portent des portraits de lui. Je détourne le regard et presse le pas.
Je dépasse le sommet de la colonne puis j'entre dans ma maison. Une grande bâtisse au toit pentu, à l'intérieur de bois sombre, morcellé en pièces par des cloisons, de bois également. On se croirait presque dans une maison japonaise. Tout est vide pour accueillir les invités, et ma mère passe d'une porte à l'autre pour les derniers préparatifs. Elle s'arrête net quand elle me voit et se met à me suivre tandis que j'erre aussi profondément que je peux dans les fin fonds de la maison. Elle aussi tient un portrait.
-Mais tout de même il va être ton époux ! Tu ne veux pas le voir avant ?
-Je t'ai déjà dit que ça n'avait aucun intérêt.
-Tu n'es pas venue aux rendez-vous qu'on avait fixés, tu ne sais pas qui il est, vous n'avez pas appris à vous connaître.
C'est là que je lâche la phrase autour de laquelle tourne tout ce rêve.
-J'apprendrai à l'aimer.
Résignée, j'ai vraiment l'air déterminée. Je n'en démordrai pas. Ce seront des noces de glace. Même quand il entrera et s'installera dans l'une des pièces, je m'arrangerai pour ne jamais avoir à en passer le seuil. Je le connais juste assez pour savoir que ce n'est pas un méchant garçon, qu'il y a peut-être moyen de coexister pacifiquement avec lui, en bonne intelligence. Et les femmes s'activent pour la cérémonie qui doit avoir lieu à l'église voisine.

Mais qu'est-ce que je fabrique dans ce rêve ?
Dites, s'il m'arrivait quelque chose dans ce genre, vous viendriez à mon secours ?

9:11 PM

mardi, septembre 13, 2005  
Hommes, vous êtes pires que nuls, vous êtes petits. Et laids. (Tristan-Edern Vaquette) (et merci à Kobal2, parce que quand même)
J'ai renoué un tout petit peu avec MSN et certains de ses habitants, juste le temps de me retrouver dans une situation étrange qui m'a fait regretter de ne pas avoir plutôt choisi un bon bouquin le soir où je me suis mis en tête de me reconnecter.
Il y a un moment où on est obligé de croire un minimum ce que racontent nos contemporains pour interagir un peu avec le monde extérieur. Or je viens d'apprendre que même ce minimum est excessif pour certaines personnes. Je suis naïve ?
Voilà comment ce qui devait être une belle aventure de non-exclusivité (je ne voudrais pas souiller le terme de polyamour en le compromettant hors de cette parenthèse) se transforme en relation extra-conjugale. La personne avec laquelle j'ai frayé était certes bel et bien dans une relation libertine avec sa copine, c'est seulement que celle-ci n'était pas encore au courant... En somme, un moment laid, médiocre, sans aucun intérêt. C'est un peu ce que j'ai pensé de celui qui était à côté de moi quand j'ai appris qu'il n'avait pas cessé de me mentir de manière éhontée, et ce pour des raisons qui restent plus que nébuleuses. Non que je me prenne pour le Bras Armé de la Justice, pour la Championne de la Morale, mais bizarrement j'ai une nette préférence pour les personnes qui comme moi essaient de jouer cartes sur table. J'aurais autant aimé ne pas me retrouver mêlée aux histoires à double fond d'un pauvre petit garçon perdu au seuil de sa quarantaine. Brrrrr. J'aurais voulu être ailleurs.
Enfin ce n'est pas très important. Je suppose qu'il faut bien que ça arrive de temps en temps. Pour toutes les fois où j'ai posé ma confiance entre les mains de ceux qui ont su la garder.

5:58 PM

lundi, septembre 12, 2005  
Sous les mots
Je me promène avec une phrase en pendentif. Je la porte depuis que j'ai réalisé qu'elle n'avait pas qu'un sens.

J'aurai ta peau.

C'est joli, non ?

2:59 PM

 
La suite a du mal à s'enclencher
mais je suis de retour, après une période de turbulences où je me suis murée dans le silence, pour vivre autre chose. Mon courrier en retard prend des allures bibliques, le nombre de gens que je devrais recontacter est alarmant, mais j'assure, j'ai confiance.
Samedi c'était l'anniversaire de Thiom, ça m'a demandé pas mal de travail pour préparer tout ça. Je voulais que ça me ressemble, et ça a marché au delà de ce que j'aurais pu espérer. C'était important.
Avant ça, j'ai failli partir à Rome et finalement je suis partie à Epi-nal. Eh bien croyez moi si vous voulez, c'est une ville très agréable, même si effectivement, c'est minuscule, et que je suppose que c'est une autre paire de manches quand il tombe des hallebardes ou qu'on est bloqué par la neige.
Nancy aussi, jolie ville, avec quelques bâtiments à tomber dans le style art Nouveau. Ne le répétez pas mais je nourris depuis de nombreuses années une tendre affection pour Emile Gallé et Daum. Je suis fascinée, leurs travaux font partie de ceux vers lesquels je pourrais revenir avec une fébrilité renouvelée.
Depuis mon retour à Paris, je passe de belles journées, un peu brumeuses parfois, à danser sur mon tapis rouge sur les dernières acquisitions musicales de cet appartement, je croque à pleines dents dans des fruits qui me rendent l'été que je n'ai pas eu, je bois dans les verres les plus fins que j'ai des vins sombres, j'ai rencontré quelques personnes vives que je croise de loin en loin, je lis, aussi, des livres que je n'arrive pas à lâcher. Je me suis un peu laissée rêver à ce que je ferais si j'avais davantage de temps. J'ai posé quelques lignes. Alors forcément, au moment d'écrire tout ça ici de manière bien ordonnée, ça a du mal à sortir. Et pourtant ce n'est pas faute d'avoir essayé.

9:45 AM

 
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