Le sieur Jean-Luc-sur-son-blanc-destrier a fait la peau au dragon qui gardait mes Très-Saintes-Pattes-de-Mouche et terrorisait par la même occasion les braves gens vivant dans les vertes contrées de ce pays merveilleux, et cela depuis, pfiuuuu, au moins une année...
Fabienne Franseuil est une brelle de la technique, mais l'euthanasie n'est pas autorisee dans ce beau pays. Vous pouvez la joindre via le mail à fabienne.franseuil[at]free.fr. A bonne entendeur...
Et puis vous pouvez aussi aller vous promener par :
mardi, décembre 30, 2008 Les cauchemars se suivent.
Je m'approche lentement de son oreille, prends une longue inspiration. J'ai tout le temps qu'il me faudra. Ecoute moi à présent. Je forme les mots consciencieusement, appuie sur certains. Marque une pause pour être sûre que les mots sont entendus. Je ne peux pas. Je ne peux pas, ça m'est tout à fait impossible. Je ne peux pas, parce que je n'en ai pas envie. Parce que je ne veux pas me détester. Nous vivons dans un monde à géométrie variable, en mouvement au gré de nos ressentis. Madone un jour. Putain le lendemain. Des forces qui nous écrasent. Je sais sortir les griffes maintenant. Je sais aussi les laisser dans leur fourreau. Je suis en train de tenir ma garde en veille. Je suis pressée, mes urgences se font douloureuses, pourtant j'ai ralenti mon pas. Et je te parle. Je ne peux pas. Parce que je ne veux pas. Cette raison seule emplit tout l'espace. Je forme les mots, lentement. Je suis dans cet instant. Dans la seconde qui suivra le moment où j'aurai cessé de chuchoter, je desserrerai mon poing du déroulement des événements, il ne m'appartiendra plus. Le temps filera à nouveau. Et tu frapperas. Ou tu ne frapperas pas. Je me battrais si nécessaire, mais cela, je n'ai pas besoin de le dire. Ca ne m'appartient déjà plus. Tu ne peux voir mon visage ; je montre la fenêtre. On m'attend. Je dois y aller, des choses sont en train de se produire en plein coeur de ma vie, je dois y aller. Laisse moi partir. Nous sommes tous le cauchemar de quelqu'un. C'est à toi d'arrêter tout cela, si tu le veux. Nous sommes tous le monstre de quelqu'un. Va en paix, j'accepte ton existence. Mais ta haine ne m'est pas destinée.
Vendredi 9 octobre, porte de Champerret. Je tape du pied sur le trottoir pour essayer de me réchauffer. Je me suis habillée en fille pour lui plaire et j'envoie des pensées d'amour à mon pantalon et à mes docks qui sont restées au chaud à la maison. Je suis en avance, il est en retard. Je retourne les deux propositions pour essayer de ne pas trop penser. Ma présence ici est irréelle, d'ailleurs tout ça n'est peut-être encore qu'une de mes ruminations inaccomplies. Si je fumais des cigarettes, je serais probablement en train de m'en griller une pour essayer de dissiper la sensation de ridicule qui s'attaque gentiment à l'inébranlable assurance que j'arborais huit minutes plus tôt.
Le voilà dans mon champ de vision, souriant et surpris par le froid, et en sourdine, par mon invitation. Je ne lui ai rien dit pour ménager le peu d'effets dont je dispose. Nous nous écartons de la bouche du métro.
-On va où ?
Ca y est. Il fallait bien que ça arrive. Nous voilà à proximité des grandes bâtisses. Je lève le nez pour lui indiquer la façade. Une photographie aux tons sépia. Deux mains nouées sur un costume sombre d'un côté. De l'autre côté, une robe très blanche.
-Je ne comprends pas.
Bien sûr, tu ne comprends pas.
-Je ne sais pas très bien comment on fait, mais je vais essayer : j'ai l'honneur de te demander en mariage. J'aurais dû dire vous ? Je ne sais pas. C'est bien comme ça ?
-Ca ne peut qu'être une blague. Tu sais ce que je pense de tout ça, et tu m'as toujours répété que tu ne te remarierais que si tu envisageais d'avoir un enfant... Attends, tu n'es pas... ?
-Mais non, pas du tout ! Bon, je vais te dire plus précisément ce que je voudrais. Je veux ton joli nom et mon joli nom sur un joli bristol. Je veux sept cent invités au bas mot. Ca se passerait dans la grande maison de ma famille quelque part dans l'ouest. Elle est entourée de grands champs qu'on me prêtera sans problèmes. On peut y installer trois grands chapiteaux, peut-être quatre... Et je veux la presse.
-La presse ?
-Oui, la presse. Il s'en passe, en un an. Ton nom et le mien auront d'ici quelques mois suffisamment d'impact pour que quelques journalistes parmi ceux qui comptent fassent le déplacement. Le mariage de la carpe et du lapin, un truc à voir non ?
-Le lapin, je te remercie. Bon, et tout ça, ça va servir à quoi ?
-Je veux une jolie liste de mariage. Une liste que l'on remplit en ligne. Si nous sommes ici c'est que j'espère trouver là-dedans une petite entreprise conciliante.
Et c'est comme ça que serait né le festival Libres et engagés. Un Woodstock en mieux, pour voir si on peut à la fois rêver et agir. Ca m'aurait plu. Mais je crois pas qu'il m'aurait dit oui. Allez hop, essayer autre chose maintenant.
mercredi, décembre 17, 2008 Infiniment se voir rouler dans la farine J'écoute le même morceau en boucle depuis deux-trois semaines maintenant, pourtant c'est ça qui me revient à longueur de journées. J'ai de plus en plus la sensation qu'on se fout de moi. Oh, nothing personal hein, c'est juste qu'on vit dans un monde difficile et que les gens n'ont plus assez de disponibilité d'esprit pour se comporter comme des gens civilisés. Ou peut-être qu'ils ont toujours été comme ça et que j'arrive à un seuil de saturation qui m'a fait remarquer ce phénomène. Je crois que, plus que les quantités de travail irréaliste que j'essaie d'abattre quand je suis pas malade ou endormie (ou en train de vivre des moments délicieux avec des personnes que j'ai choisies parce que quand même), c'est ça qui m'épuise. J'ai besoin de vacances pour ça, me recharger en humanité. Cette saloperie commence à me contaminer peu à peu. Je ne suis pas faite pour la mesquinerie, je suis faite pour boire mon verre d'un trait, pour rire fort de quelque chose (et non pas de quelqu'un), pour sortir des sentiers de ce que je suis supposée faire, et marcher sans boussole en me foutant éperdument d'avoir perdu le nord depuis longtemps. J'ai besoin de vacances. Ca urge. Parce que ça va plutôt bien et mon cerveau ne fait pas tout simplement des bonds d'euphorie.
12:48 AM
On n'est pas rendus Je suis un peu fatiguée. Dans le RER les larmes veulent couler, je les laisse faire. Je suis plutôt fatiguée. Un peu déprimée aussi. J'ai un fond de colère qui refuse de sortir, parce que je suis quelqu'un de civilisé, alors je garde. Et puis je tape sur des trucs aussi, parce que ça va bien, j'ai compris.
Je suis une maison. Une maison ouverte aux quatre vents. Entre qui veut. Quand on entre, la maison semble vide, puis à mesure qu'on revient, on voit progressivement apparaître une table, un fauteuil, un bouquin. Parfois il ne se passe rien, la maison reste vide parce que c'est comme ça dans l'immobilier, on a le coup de foudre ou on l'a pas. C'est pareil pour les maisons. Parfois il y a des gens qui vivent dans la maison, non que ça soit concerté, prévu, cautionné par une quelconque autorité. C'est comme ça. La plupart des gens que je côtoie ne font que passer. Ca ne dure pas très longtemps, mais ils passent quand même, font grincer les lattes du parquet. Rien que cela, parfois, c'est fatiguant. La semaine dernière, on m'a parlé deux fois de suicide. Deux fois on s'est ouvertement foutu de moi. Je n'ai pas d'ego sur-dimentionné, mais. On m'a dit aussi que j'étais "très jolie, aujourd'hui". J'ai éprouvé de la pitié, aussi. Je n'aime pas ce sentiment.
12:23 AM