Le sieur Jean-Luc-sur-son-blanc-destrier a fait la peau au dragon qui gardait mes Très-Saintes-Pattes-de-Mouche et terrorisait par la même occasion les braves gens vivant dans les vertes contrées de ce pays merveilleux, et cela depuis, pfiuuuu, au moins une année...
Fabienne Franseuil est une brelle de la technique, mais l'euthanasie n'est pas autorisee dans ce beau pays. Vous pouvez la joindre via le mail à fabienne.franseuil[at]free.fr. A bonne entendeur...
Et puis vous pouvez aussi aller vous promener par :
mardi, mars 11, 2008 Indifférence Ce matin j'ai pris le métro pour me rendre à mon travail. A Châtelet, je sors de la rame, presse un peu le pas dans les escalators, il me reste une petite volée de marche pour arriver jusqu'au grand couloir.
Il est là.
Allongé sur les marches, la tête enfouie dans son paletot marron. Quelques mèches de cheveux gris laissent deviner son âge. On ne voit pas son visage.
Et il est allongé exactement dans la même position que la dernière fois que je suis passée par ces escaliers.
La dernière fois que j'ai emprunté ces escaliers c'était pour aller rejoindre A. Dimanche soir. Nous sommes mardi matin.
La dernière fois, voyant la position inhabituelle dans laquelle il était allongé, je m'étais arrêtée pour regarder si l'homme respirait. Avais vu le paletot se soulever doucement. J'étais partie en me disant qu'on ne pouvait pas secouer tous les sdf sous prétexte qu'ils dorment dans une position bizarre.
Je me fige pour essayer de percevoir le moindre mouvement. Rien. Juste les autres qui s'agitent pour gagner deux minutes sur le chrono. Je me mets à détester tout le monde. Pourquoi faut il que ça soit moi qui doive donner l'alerte ? Pourquoi moi, qui passe maintenant, si tard ? Un homme est mort, tout le monde s'en fout. Quelques uns bougonnent en se disant que franchement, il aurait mieux fait de se mettre ailleurs celui-là, il gêne tout le monde. Enfin il ne gêne pas tant que ça manifestement, puisqu'on l'a laissé crever sans assistance.
Ce qui me met mal, très mal à l'aise, c'est que je suis détentrice d'un brevet de secourisme. Que j'ai appris les gestes qui sauvent et que si j'avais réagi plus activement la fois précédente, on aurait peut être pu faire quelque chose. Je ne sais pas s'il aurait vraiment fallu, mais on aurait pu. Et je suis partie en me disant que l'homme était probablement trop bourré pour se rendre compte de l'inconfort de sa position. Que quand il aurait un peu atterri il changerait de place. Quelle ironie.
J'ai tenté de trouver quelqu'un de la RATP pour avertir au moins qu'il y avait un mort dans ce couloir et qu'on fasse le nécessaire. Au mec que j'ai enfin trouvé, j'ai eu la sensation d'annoncer qu'il y avait un déchet, un encombrant, qui occupait un couloir. Pas un être humain, mort. On fait un tel foin de la mort, quand il s'agit de gens "normaux". Il y a des cadavres dans les couloirs de Châtelet parce que les services de propreté sont trop occupés à vider les poubelles des canettes et des emballages de barres chocolatées. Et les gens à gagner deux minutes sur le chrono en oubliant ce qui est vraiment important. Et que je fais partie de ce lot.
11:01 PM